Des projecteurs de studios d’Hollywood aux flacons de parfum LVMH, Christian Buée et ses collaborateurs expédient leurs verres soufflés du Béarn aux quatre coins du monde.
À la sortie d’Hagetaubin, le GPS indique un chemin agricole. Au bout de la route sinueuse, proche d’une rivière, un hangar agricole réhabilité se dresse. Hormis deux maisons voisines, rien autour. Au coeur de ce cadre bucolique, Christian Buée a installé son entreprise Verrehaget, spécialisée dans le négoce, et celle de son fils Yoann, Verresatine, qui produit des pièces exportées en France et à l’étranger.
Dans l’atelier, les chalumeaux sont en action. Ludivine, concourante au titre de Meilleure Ouvrière de France, travaille à la main. Maxime, suite à une formation maison, gère la production de seringues spéciales grâce à une machine automatisée.
« On a plus de 2 500 clients répartis dans tous secteurs d’activité : cinéma, luxe, industries. Dans l’automobile, on réalise des pastilles de saphir, incrustées dans des disques de freins pour pouvoir faire des analyses et des mesures précises. Le verre est partout ! », signale Christian Buée.
Cette réussite, le Parisien d’origine la doit à un savoir-faire de passion et un réseau construit tout au long de sa carrière. Il ne se destinait pas à être chef d’entreprise. Finalement, le destin a choisi pour lui.
« On avait acheté une petite maison à Hagetaubin, les gens du pays l’appelaient la ruine », se souvient Christian Buée. « Ma femme Christiane me dit qu’on vend notre maison à Bonneuil et que je démarre mon entreprise dans le Sud-Ouest. J’avais vraiment la trouille, j’avais un très bon salaire. Puis, me retrouver en pleine campagne, sans atelier… »
L’homme connaît les fournisseurs comme Schott, les souffleurs de verre en France, les transporteurs. Il a également de précieux contacts à l’étranger (Angleterre, Japon, Allemagne). L’aventure Verrehaget débute en 2002. Christian Buée est dans le négoce : il signe des contrats avec des clients et externalise la production.
Parmi eux, les studios d’Hollywood ! Les ampoules quartz, placées sur des projecteurs, provoquaient des rayonnements infrarouge et ultraviolet irritants pour la peau des acteurs. Il a alors mis au point un mécanisme qui solutionne ces désagréments. Aujourd’hui, plusieurs centaines de pièces partent aux États-Unis chaque mois. Elles sont réalisées par Verresatine, autre entreprise familiale fondée par son fils Yoann en 2007, le site de production en direct. Les locaux ont été totalement repensés par Christiane, qui a suivi une formation de conjoint collaborateur.
La force de l’unicité
Chez eux, deux règles : pas de catalogue, ni de refus à un client sans avoir tenté. « Ce que je veux, c’est un mouton à cinq pattes ! », revendique Christian Buée. « Il faut savoir utiliser les propriétés thermiques, optiques et chimiques du verre. Je m’amuse comme un petit fou. On va essayer d’arranger le client et si cela a un coût financier, on le prévient. » À partir de tubes en verre, les pièces sont faites à la main grâce au chalumeau et au souffle ou par des machines pour les productions à plus grande échelle.
Verrehaget et Verresatine, qui réunit quatre membres de la famille Buée et trois salariés, © Eric Traversié collaborent aussi avec des grandes marques du luxe et de l’horlogerie. Le bouche-à-oreille fonctionne parfaitement. « On a commencé avec Guerlain sur les Champs-Élysées. On leur a fait leur fontaine à parfum. Cette première affaire nous a ouvert les portes des grandes maisons de luxe. Par exemple, une entreprise du groupe LVMH nous demande de protéger un flacon de parfum unique pour chacune de ses 200 boutiques. On met une belle cloche dessus. Chaque pièce est unique car on a les petits défauts du souffleur de verre. Les marques jouent sur ce côté artisanal. »
Avec ses collaborateurs, Christian Buée a également résolu des problèmes pour des horlogers réputés, notamment une porte de 5 mm pour refermer le corps en verre d’une horloge d’une marque prestigieuse suisse.
Les industries à l’écoute
D’autres institutions publiques et privées font appel à leurs talents et leur savoir-faire : le ministère de la Justice pour les oeilletons des portes de prison, les plus grandes entreprises du bassin de Lacq. « Sur les marchés de niche, on peut avoir des commandes de moyenne quantité : 3 000, 5 000 pièces à faire. Cela n’intéresse personne de régler ces machines pour si peu. Nous, c’est notre force. »
Pour éviter la production à la chaîne, son fils Yoann a développé, avec des ingénieurs belges, une machine automatique qui reproduit le travail simple d’un souffleur. Ariane Group, frappé par cette prouesse, s’est procuré l’outil. « Du jour au lendemain, on a eu une commande d’une machine à 400 000 euros », sourit Christian Buée. Une autre machine suivra peu après pour une entreprise du domaine militaire.
L’heure de la retraite a presque sonné pour l’homme. Son fils Yoann atteint d’une longue maladie et en incapacité de travailler, c’est Sandra, sa fille, après 10 ans à gérer les affaires commerciales et la communication des sociétés, qui reprend toutes les activités via une holding, aidée par l’assistante de gestion Laëtitia. L’entreprise entame un nouveau tournant avec l’arrivée prochaine d’un commercial.
Pour faire perdurer l’histoire familiale.
Sites internet : www.verrehaget.fr / www.verresatine.fr
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